Une InMature et un scalpel :
Les histoires plastiques d’Isabelle Sarfati :
Le docteur Isabelle Sarfati pratique la chirurgie plastique. Sa spécialité : les seins. J’étais ravie de la rencontrer, j’ai toujours eu envie de mieux comprendre ce qui se passait dans la tête d’une femme, ou d’un homme, ayant choisi la mission de nous embellir voire de nous réparer. En l’occurence, surtout une femme comme vous et moi, qui a aussi sa vision du vieillissement. Le nôtre, le sien…
La chirurgie esthétique me fascine autant qu’elle me « terrifie ». J’ai assez peu de réticences à « toucher » à mon corps. J’ai fait dans mes jeunes années une réduction mammaire et une liposuccion abdominale entre 40 et 50 ans. Mais, je dois avouer qu’il y a toujours un moment, avec les suites post-opératoires (douloureuses et entravantes), où je me suis vraiment demandée pourquoi je m’infligeais un truc pareil. En ce qui concerne le visage, j’ai vraiment beaucoup trop la trouille même si je me tire régulièrement le bas des joues vers les oreilles devant ma glace. L’angoisse de ne pas reconnaître, de me retrouver face à une inconnue devant le miroir.
Isabelle Sarfati, 62 ans, m’accueille chaleureusement à L’institut du sein. Allure dynamique et colorée en jean et baskets à fleurs. Impossible de ne pas me dire que si elle a fait quelque chose, c’est vachement bien ! En vrai, je sais qu’elle a fait « des choses ». Elle en parle librement, voire avec un peu de provoc, dans son livre Histoires Plastiques (Stock) dans lequel elle nous parle de l’amour de son métier au travers ses différents patients.
Alors, discutons ensemble :
C’est quoi la chirurgie plastique ?
« Elle regroupe 2 choses :
- La chirurgie réparatrice. Qui répare une pathologie. Un accident, un cancer, une malformation congénitale. Il y a un préjudice qui porte atteinte à l’intégrité physique. Cette chirurgie est alors prise en charge pas la Sécurité sociale.
- La chirurgie esthétique. Qui répare quelque chose considérée comme normal. Qui n’a rien de pathologique. Le vieillissement n’est pas une maladie, c’est normal. Avoir des petits ou des gros seins n’est en aucun cas « anormal ».
Mais qu’est-ce qui est normal ou qu’est-ce qu’il ne l’est pas ? Il y a bien sûr une zone assez floue d’intersections entre les deux, avec des curseurs pouvant varier d’une société à l’autre, d’une époque à l’autre. »
La chirurgie plastique : une vocation ?
» Je ne sais pas si on peut parler de vocation. Mais dans la médecine, la réparation est quelque chose qui me convient. Je n’ai pas fait de mon métier d’affronter la maladie et je m’épanouis dans cette branche particulière. C’est un vrai choix même s’il découle aussi de rencontres.
J’ai toujours été une « plasticienne » au sens large. Si je n’avais pas été médecin, j’aurais pu faire des films ou être architecte. J’ai toujours aimé l’art, l’harmonie. La chirurgie plastique est alors le canal que j’ai trouvé pour exprimer cela.
Et je me suis spécialisée dans la chirurgie du sein parce que je voulais restreindre ma spécialité à quelque chose où je pouvais être vraiment bonne. Je voulais pousser cette spécialisation. Si je fais des seins du matin au soir, je vais être excellente ! »
Et être une femme dans ce métier ?
« Être une femme ne me rend en rien différente dans ma pratique ou dans ma relation avec mes patients. Je n’aime pas ces distinctions homme/femme. Je ne pense pas avoir une meilleure écoute ou empathie. Ceci étant dit, bien évidemment, il y a plus d’identification avec mes patientes. D’autant que j’ai choisi une spécialisation qui fait de moi une chirurgienne des femmes. On peut alors parler d’une certaine sororité. »
Vous dîtes dans votre livre, que la chirurgie plastique est une arme de liberté ?
« De pouvoir et de liberté !
Contre quelque chose que l’on peut vivre comme une tragédie. Le temps qui passe, la génétique, les accidents de la vie. Tout ce qui nous prédestine. Grâce à la chirurgie, on a le pouvoir d’y faire quelque chose. Elle donne la liberté de se penser autre, de se rêver différente. C’est très difficile de ne pas s’aimer. La gêne de soi, la honte de soi, c’est terrible. Certaines femmes en viennent à zapper des zones entières d’elles-même. Alors, que nous avons tous besoin d’incarnation. »
Quelle est votre propre vision du vieillissement ?
« C’est quand même la meilleure chose qui puisse nous arriver. C’est notre « best scénario » !
On vieillit aussi selon son temps, son époque. Nous ne vieillissons pas du tout comme les générations précédentes. Avant, à mon âge, je n’aurais même plus pu travailler parce que je ne verrais plus rien. Plus personne ne remet en cause les opérations des yeux pour améliorer la vision. C’est aussi de l’anti-âge. La chirurgie, la médecine esthétique, si elle est bien faite, peut nous permettre des améliorations dans le même ordre d’idées. Il s’agit plus aujourd’hui de s’entretenir. Moi, cela ne m’intéresse pas de faire plus jeune. Je veux juste vivre mon âge le mieux possible. Je veux rester « aimable ». À mes yeux et pour les autres. Il faut supporter son regard sur soi-même pour pouvoir s’ouvrir aux autres. Tant mieux si beaucoup de femmes se sentent aimables sans rien faire. Mais d’autres ont besoin de faire des petites choses pour cela.
Le problème de la chirurgie esthétique est, paradoxalement, qu’elle ne doit pas se voir. Si elle se voit, c’est la peur de vieillir qui se voit encore plus. Certaines femmes sont tellement terrifiées par ce qu’elles fuient qu’elles ne voient plus qu’elles en font trop. Une femme sur-liftée, sur-injectée fait plus âgée finalement qu’une femme qui n’a rien fait.
En fait, en termes d’esthétique, il vaut mieux entretenir les choses que faire un grand ravalement. On fait un peu attention à tout, on fait des choses raisonnables. Il faut comprendre qu’en matière de « faux », il ne doit pas être improbable sinon il saute aux yeux. Le trop lisse n’existe pas, tout comme certaines formes de lèvres trop gonflées. Certaines actrices ne peuvent même plus tourner des films d’époque parce qu’elles ont des physiques qui n’existaient pas alors. »
Bon, vous faites quand même plus jeune que votre âge 🙂 ?
» Non, vous pensez cela par rapport à l’image que vous avez des femmes de plus de 60 ans. Celle de nos mères avec qui nous avons grandi. Je fais l’âge des femmes de 60 ans d’aujourd’hui ! Regardez Sharon Stone, je ne trouve pas qu’elle fasse plus jeune. Elle fait 60 ans, elle est juste belle. Tout comme Jane Fonda, elle fait son âge. »
Extraits :
« … Je me suis fait opérer pour me faire opérer, pour rester vivante, active, désirante, désirée. J’ai la chirurgie esthétique militante et raisonnable. J’aime corriger souvent des petites choses. Je fais de la chirurgie d’entretien comme pour une voiture, un canapé ou une robe… »
« … Je vais chez un psy depuis que j’ai 25 ans au même titre que je fais de la danse, pour rester le plus souple possible, perdre le moins possible de liberté… La chirurgie plastique, c’est aussi ça pour moi. Une manière souple et interactive de cohabiter avec mon corps. Une arme de liberté face à mon anatomie, à mon destin. Une manière de le déjouer, de donner du jeu au Je.. »
« J’ai envie d’être plastique, physiquement et psychiquement. D’être souple, en mouvement, de pouvoir changer de vie, de tête et de point de vue… »
À lire également sur le blog : La médecine esthétique.
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Superbe article. Des choix assumés dans le ni trop ,ni pas assez,
Cette femme reste souple dans sa tête et dans son corps pour profiter le plus longtemps possible. Merci de nous présenter un épanouissement qu.elle revendique le plus adapté à son âge et à ses envies.
J’aime beaucoup cette notion de souplesse…
La première chose que ma mère 76 ans a faite l’année dernière dès qu’elle a été libérée de sa séquestration mortifère, ce fut de prendre RDV chez une chirurgienne esthétique.
En une semaine, l’intervention a été programmée et réalisée pour un lifting.
Elle avait perdu 20 kg et vraiment son visage tout fripé ne correspondait plus à sa façon de marcher, son dynamisme. En résumé, c’était moche.
Quand je suis allée la chercher le lendemain de l’opération, elle faisait trop peur avec ses bandages, Sa tête était un ballon de rugby, des yeux de panda. Elle n’a pas eu mal, juste l’inconfort des tiraillements; elle a le cuir solide.
En tout cas, une fois le visage dé tuméfié, on a pu voir le travail d’artiste de sa chirurgienne. Un visage lisse mais pas trop et parfaitement naturel.
A sa visite de contrôle, j’en ai profité de mon côté pour qu’elle me fasse des injections d’acide hyaluronique des sillons nasogéniens.
Le résultat est top.
J’aime bien l’idée que l’on fasse cela pour SE plaire
Comme d’habitude, un réel plaisir de vous lire.
Merci beaucoup ☺️
Une consolation, nous vieillissons mieux que nos grand-mères … en général !
Bon Weekend
Bonsoir Virginie,
C’est toujours un plaisir de lire tes articles, celui-ci me parle bien, une de mes collègues va se faire faire une réduction mammaire cette semaine, et moi, et bien j’aimerai bien me faire enlever ce double menton qui me complexe depuis mon adolescence et qui va finir en fanons de baleine avec l’âge, mais… Il y a quand même la peur du ratage, comme le dit le Dr Sarfati, quand c’est raté c’est horrible ! Et malgré tout, le prix aussi, je me dis que c’est un peu gaspiller et que je devrais plutôt accepter mon image. En tout cas, j’ai bien envie de lire le livre, toujours preneuse de ce qui est écrit avec humour !
À bientôt
Bises
C’est une décision loin d’être anodine donc difficile à prendre…
Virginie, savez-vous que c’est grâce à vous, en lisant un post déjà ancien, que j’ai osé consulter un chir qui m’a fait une liposuccion du menton? Il a aspiré 100 ml de graisse (il m’a montré)! Le bénéfice est toujours d’actualité car depuis, je ne fais plus de fixation sur ce menton, et mon regard en est plus pétillant! Effet LP (comme les médicaments) encore en cours! Merci!
Genial. Je suis ravie si cela vous a fait vraiment fait du bien.
On vieillit beaucoup mieux aujourd’hui que nos parents. En plus, on fait plus jeunes dans la tête aussi je trouve. Je pense que l’on fait plus attention à nous, que l’on utilise des produits cosmétiques adaptés et que l’on peut faire appel à la médecine esthétique avant d’aller vers la chirurgie si cela nous permet de nous sentir bien.
C’est tout à fait cela. Virginie