Intimité : Cache toi que je te trouve !
Son intimité, la préserver peut être parfois comme un jeu de cache-cache. Où comme les enfants, nous avons autant envie de bien se cacher que d’être trouvé. Qui n’a pas envie d’être « entendu » sans même avoir à s’expliquer ? Pour que cela soit possible, il faut bien donner à voir de soi. Nous aspirons tous à préserver notre « jardin secret » tout en espérant que certains comprennent ce qui se cache derrière nos mots ou nos silences.
Le blog est, à la base, un journal intime. J’essaie d’y être le plus sincère possible et m’y livrer souvent. Mon but est en premier lieu que vous vous reconnaissiez dans ce que j’écris, dans ce que je vis. C’est une intimité que je souhaite partager pour un effet miroir. Mais aussi, je me protège quand même. Derrière mon « personnage ». C’est « Jeune Vieillis Pas » qui s’exprime. Je suis moins pudique grâce aux mots qui seraient comme une armure.
Je suis moins à l’aise avec l’image. Sur Instagram, je me montre peu (mais ma pudeur serait peut-être moindre si je me trouvais photogénique), n’expose pas ma vie quotidienne. Je ne raconte pas mes failles et mes doutes face caméra. Je m’y pose sans cesse la question : Que dois-je montrer, qu’est-ce que je préfère cacher ?
« Les doutes, c’est ce que nous avons de plus intime. »
Albert Camus.
L’intime est, d’après son étymologie latine « intimus », ce qui est à l’intérieur de nous et par extension tout ce qui relève de la vie privée. Mais qui peut être révélé à un cercle restreint. Nos pensées, nos expériences, nos émotions nous aimons les partager avec nos amis les plus proches. Depuis la mort de mon mari, il me manque tout comme l’intimité que nous partagions. Partager son intimité est souvent une preuve d’amour et d’amitié. Et puis, je pense que dans le fond, nous ressentons tous ce besoin d’être compris, d’être aimé pour ce que nous sommes. Et pour cela, il nous faut bien se dévoiler.
L’intimité, c’est aussi parfois le besoin que nous avons de revenir vers soi. Un retour sur soi, sur son intérieur (sa maison) auxquels on est plus enclin l’hiver. De vivre un peu loin du regard des autres (peut-être aussi parce que je traîne en jogging avec de grosses chaussettes).
L’intime, de la chambre aux réseaux sociaux.
Expo au Musée des Arts Décoratifs (jusqu’au 30 mars 2025).
Un intéressant voyage à travers « l’intime », du XVIIIè siècle à nos jours.
Le mot apparait en France au cours du XVIIIe. Mais la notion ne s’impose seulement qu’au XIXème avec l’émergence d’une classe bourgeoise qui va séparer vie professionnelle et vie privée mais aussi les activités masculines et féminines.
Il n’y a quasiment que des représentations de femmes dans cet expo ! Serait-ce un sujet plus féminin ?
L’histoire le prouve : « Dans la bourgeoisie qui s’affirme comme classe dominante au XIXè, l’homme est aux « affaires » tandis que la femme est maîtresse du domestique et de l’intime ».
On parle alors de « femme au foyer » de « femme d’intérieur ». Il faut attendre le combat féministe pour que les femmes arrivent à se dissocier de l’espace clos de leur maison. Et encore récemment, le terme de « ménagère (de moins de 50 ans, en plus) est toujours dans les esprits.
Il y a dans l’expo un petit film sur « comment rendre une femme au foyer heureuse » plus que cocasse ! La réponse étant en gros tout ce qui concerne la couture et la déco de son intérieur.
J’ai été particulièrement amusée par la partie sur la chambre Et le lit. J’y passe tellement de temps. Je vous écris actuellement depuis mon Queen size. Eh bien, comme John Lennon, Frida Kahlo, Ben…:)
Et, j’ai particulièrement aimé l’imposante salle sur le design intitulé : « Entre isolement et promiscuité. »
« D’un côté, un certain mobilier dénote le repli sur soi protecteur dans un cocon, très populaire dans les années 50/60. De l’autre, l’envie de se rassembler, de se rapprocher, dans une proximité où partager son intimité, typique de la fin des années 60 et 1970. » Nous explique-t-on.
Avec les nouvelles technologies, les techniques de protection et de surveillance, les réseaux sociaux et les confinements, les frontières entre privé et public sont de plus en plus floues et poreuses. Tout cela nous a autant poussé à nous isoler (walkman, portables, jeux vidéo…) qu’à nous ouvrir (portable (oui, il est finalement dans les 2 catégories), Internet, les rencontres en ligne…)
Sans oublier la télé-réalité. Les téléspectateurs ont été, depuis le début des années 2000, transformés en voyeurs d’une intimité volontairement exposée.
Parfaite transition pour :
L’intimité aux yeux de tous.
La série Culte sur Amazon prime.
Une jeune productrice aux dents qui rayent le parquet des studios de télé va se donner corps et âme (au risque de perdre cette dernière) pour développer et diffuser la première émission de télé-réalité en France.
Je fais partie de ceux qui sont restés hypnotisés devant Loft Story. Jamais rien vu de tel. On regardait y vivre des jeunes enfermés H24 où rien n’était caché, censés trouver l’amour. On a beaucoup parlé à l’époque de l’avènement du « rien ».
Cette série nous montre l’envers du décor. À part Loana, qui est devenue le symbole (et la victime ?) de ce nouveau type de programmes, on ne voit absolument pas les autres « lofteurs ». On assiste en fait à la fabrication « made in France » et à la diffusion (qui a divisé le pays) de ce concept néerlandais « Big Brother » pilotées par Alexia Laroche-Joubert. À chaque étape, le show risque de capoter entre trahisons, conflits internes et opposition du CSA. On est aussi le témoin de la guerre entre M6 et TF1. On regarde vraiment comme un thriller la naissance de ce qui est devenu un phénomène de société. Avec 2 actrices formidables dans les rôles de la productrice (Anaïde Rozam) et de la lofteuse paumée (Marie Colomb).
Dans la tête de Garry Kasparov.
Rematch sur Arte.
En 96, le champion du monde Kasparov affrontait pour la première fois un ordinateur, Deep Blue. Il remportait la partie. La série se penche sur le rematch un an plus tard. IBM ayant mis des moyens considérables pour rendre sa machine encore plus performante.
Même si, comme moi, on n’y connait rien aux échecs, le nom de Garry Kasparov, ce « maître » russe, nous est familier. Et il faut croire que ce jeu est particulièrement télégénique. J’avais déjà adoré Le jeu de la dame.
« Les échecs, c’est la guerre dans sa forme la plus pure » affirme Kasparov dans le premier épisode.
Je me suis donc laissée happer par cet affrontement entre deux cerveaux : l’un humain (enfin un sur-homme quand même) et l’autre pas, Deep Blue étant l’une des premières intelligences artificielles.
Quelle tension devant ces 64 cases !
La stripteaseuse et le milliardaire.
Enora de Sean Baker.
Anora, jeune danseuse érotique (et plus sans affinités) croit en un avenir meilleur lorsqu’elle rencontre et épouse le fils d’un oligarque russe. Mais les parents de ce dernier vont tout faire pour annuler ce mariage.
Étonnante Palme d’Or à Cannes ! Et je comprends que cela ait pu déstabiliser les « puristes ». On n’est pas habitué à voir ce type de films récompensé. Anora, c’est quand même un « bon bordel » (sans jeu de mots). Une comédie assez déjantée mi-burlesque, mi-noire. Un conte de fées (entre Cendrillon et Pretty woman) ultra moderne, tapageur mais qui se balade aussi du côté des Affranchis (le film de Scorsese).
Je suis d’accord que la première du film s’appesantit un peu trop sur les « talents » d’Enora. Puis arrivent les sbires délégués par la famille du « marié », et le film se transforme en une espèce de road movie vraiment réjouissant. Mais il y a quand même un message « social » (Cannes oblige). Anora se débat dans un mode qui ne veut pas d’elle. Chacun est assigné à sa classe sociale. Faut-il être prêt à tout pour en changer ? Et finalement, est-ce vraiment possible ? La dernière scène du film est totalement bouleversante.
Et cette actrice, Mikey Madison, quelle énergie, quelle force elle donne à son personnage ! Je ne sais pas si le film est à la hauteur de la plus importante récompense de Cannes. Mais nul doute que son actrice aurait pu remporter haut la main la Palme d’interprétation.
Je me livre aussi, un peu sur le même thème, dans ce post : Qu’est-ce que je suis bien chez moi !
À ceux qui me suivent régulièrement, je suis ravie de vous informer que les commentaires sont, enfin, de nouveau, possibles. Alors, j’attends avec joie vos réactions :).
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J’intime l’ordre à mes proches de lire ton bel article, chère Virginie!
Merci cher Claude 🙂
Merci Virginie pour ce post très personnel.
Très tentée par l’exposition et le film Anora. J’ai toujours beaucoup de plaisir à te lire.
Merci Anne, bonne fin de week-end
Excellent …..merci à Vous, cordialement.
Merci à vous. Bonne fin de week-end.
Bonjour Virginie,
l’intimité est un thème intéressant mais je trouve que le rapport entre l’intimité et les hommes mériterait d’être plus développé, même si tu t’adresses suretout aux femmes.
Pourquoi les hommes sont-ils plus réticents que les femmes à dévoiler leur intimité ?
Est-ce que ça dépend des sociétés, des époques ?
Est-ce que cela change ?
Est-ce que les hommes partagent plus leur intimité avec des femmes qu’avec des hommes ?
Est-ce que l’intimité existe en dehors de l’échange sur l’intimité ?
Je termine en recommandant les trois nouvelles de »Un homme intime ».
PS je trouve que le message social d’Anora est vraiment maigrichon
à suivre !
Bien sûr, il m’est plus difficile de parler de l’intimité masculine. Peut-être tout simplement parce que je pars toujours de moi quand j’écris.
Je faisais malgré tout il y a quelle année une rubrique : Les hommes aussi ! Je devrais peut-être la reprendre
En tous les cas, la coïncidence est belle puisque tu m’as offert ton livre alors que j’avais déjà commencé à travailler sur ce sujet. Pourrais-tu rajouter le lien pour pouvoir commander ton livre qui nous fait effectivement entrer dans l’intimité d’un homme ? Bonne fin de journée.